Au Japon

Au théâtre ce soir…

Bonjour! Aujourd’hui, je vais te parler spectacle. Peut-être connais-tu déjà les deux formes de théâtre Japonais : le Nô et le Kabuki. Ces deux théâtres traditionnels sont toujours très présents au Japon, mais ils sont souvent considérés comme élitistes et peu accessibles. Une autre forme théâtrale, très inspirée de la culture occidentale a vu le jour dès 1913, et connait aujourd’hui une popularité sans égal, mené de manière immuable par la même compagnie : la revue Takarazuka. Très loin de mes goûts personnels, Sakura et moi nous sommes vus remis des places en cadeau pour un de ces spectacles, l’occasion de découvrir un des divertissements préféré des mamies nippones… En route pour la ville de Takarazuka, capitale incontestable de la revue du même nom, dans la préfecture de Hyôgo, à 30 minutes d’Ôsaka…

Si tu es passé au Japon, tu as sûrement vu ces tonnes d’affiches de spectacles, Lady Oscar ou autre, qui ont, de prime abord, un petit quelque chose de…dérangeant… Si tu regardes attentivement l’image ci dessus, tu ressentiras peut-être ce petit quelque chose… Et si tu prêtes bien attention aux 3 personnages, tu remarqueras sûrement que les 2 hommes ne sont pas beaucoup plus virils que la jeune fille, et pour cause, il n’y a que des femmes sur cette image. En effet, si depuis 1629 les femmes sont interdites dans les formes théâtrales du Nô ou du Kabuki, à l’origine, ils leur étaient presque réservé. En 1913, le président des lignes de train Hankyu, extrêmement présentes dans notre région, et dont le terminus de l’une d’elles était la ville de Takarazuka, déjà appréciée pour ses sources chaudes, décida de créer une troupe théâtrale inspirée des revues occidentales, en vogue à l’époque, exclusivement féminine. Il pensait ainsi donner à la ville une attraction qui favoriserait le commerce, et sa ligne de train. Il était loin de se douter qu’il lançait un divertissement qui allait devenir célèbre dans le pays tout entier. Pourtant, seulement 10 ans après la création de la revue, le succès était déjà tel que la troupe se vit construire un théâtre spécialement pour elle.

Nous voici à son entrée. Cela ne se voit pas forcément sur ce cliché, mais le bâtiment est immense. Alors si comme moi à ce moment là tu ne sais toujours pas trop en quoi consiste le Takarazuka, je vais essayer d’éclairer ta lanterne. Essaye d’imaginer un mélange entre les comédies musicales si populaires chez nous (choisi celle que tu veux, Cléopâtre, Notre Dame de Paris, Les 10 commandements, pour moi c’est tout du même niveau…), le jeu d’acteur des vieux films des années 40, des moyens techniques plus impressionnants que les concerts de U2 (pas au niveau pyrotechnie, mais au niveau mécanique de scènes, j’y reviendrai). Mixe tout ça, transforme tous les acteurs en actrices qui essayent d’avoir une grosse voix, et tu obtient quelque chose de proche de ce que nous sommes allé voir. N’oublie pas d’ajouter 90% du public représenté par des femmes de plus de 60 ans, c’est important.

Dans le hall qui mène à la salle de représentation, des tonnes de magasins de souvenirs, de produits dérivés etc se succèdent, dans un décors dignes des plus grands théâtres parisiens (j’imagine, parce qu’en fait, je suis seulement allé dans de petits théâtres à Paris…) Lustres éclatants, moquettes rouge, pianos à queue, grands escaliers sont les ingrédients de décoration et d’architecture. Malheureusement, les photos étant interdites (en fait surtout pendant la représentation, mais dans le doute, j’ai fait gaffe), j’ai dû sérieusement réduire le nombre de clichés possibles…

Nous entrons dans la salle, et là déjà je comprends qu’on n’est pas venu voir le truc miteux et confidentiel que j’avais pu imaginer. La salle est immense, vraiment immense, impossible à embrasser d’une seule photo. Je me dit que ce ne sera jamais plein, puisque, je ne l’ai pas encore précisé, mais nous sommes Lundi, et le show commence à 13h!!! C’était avant de comprendre combien tout ça est populaire, car la salle fut comble en quelques minutes, et le show a débuté à 13H00 pétante… Au dessus de nous, il y a un balcon, autant dire qu’il y a de la place pour toute la ville…

Nous sommes donc bien installés, prêts à en découdre avec 3h de show (en fait il y a 2 parties, la pièce elle même, de presque 2H, puis une partie plus courte et moins théâtrale, plus… revue). Comme je l’ai dit, le public est plutôt âgé, et féminin, mais pas que. La scène devant nous me semble pharaonique, simplement dans sa largeur, c’était avant de voir la profondeur, colossale. Malheureusement, tu ne pourras pas voir grand chose sur mes pages, trop peu téméraire que je suis pour bafouer les interdictions de photographier…

Parlons un peu du spectacle en lui même, à défaut de pouvoir te le montrer.  Je vais commencer par décrire ce que j’ai trouvé positif, cela évitera que j’ai l’air de vouloir sauver les meubles après avoir décrit ce que j’ai vraiment pas aimé…

Alors d’abord il faut noter l’extraordinaire mise en scène. Lors de cette pièce, titrée : 愛のプレリュウド (prélude à l’amour), j’ai compté une quinzaine de décors différents. La plupart sont des panneaux comme celui que tu vois sur la photo ci-avant, mais pas seulement. On a aussi droit à d’énormes structures qui sortent du sol, qui font même des rotations pour dévoiler une autre pièce etc… Effet assuré, et modularité de l’espace maximale. Ensuite il faut noter la présence d’un vrai orchestre dans sa fosse, un jeu et des chansons en live, toujours agréables. La revue Takarazuka compte 5 troupes différentes. Celle que nous avons vu, semblait compter environ 80 actrices (comptées rapidement pendant le tableau d’ouverture), les rôles d’hommes sont campés par des femmes en costume, aux cheveux coiffés à la garçonne, et qui tentent avec plus ou moins de réussite, de prendre une voix gave. Si au départ l’effet est très mitigé, il faut avouer qu’au fur et à mesure, on s’y fait, et certaines arrivent vraiment à faire oublier leur sexe… pas toutes malheureusement…

Ceci étant noté, il faut que je te précise si tu ne l’a pas encore compris, que je ne suis vraiment, mais alors vraiment pas fan des comédies musicales… les nôtres, les Américaines, et maintenant je peux l’affirmer, des Japonaises non plus. Pour cette pièce particulièrement, j’ai trouvé les compositions musicales relativement pauvres, voire répétitives. L’histoire était tellement basique et cousue de fil blanc que mal ou peu comprendre le japonais comme moi n’a en aucun cas été un problème. Les quelques cascades (combats) souffrent clairement, et sans sexisme, d’être exécutées par des femmes. Et puis c’est long… Le jeu est un peu caricatural, mais pas comme doit l’être un jeu théâtral, exagéré etc…non non, plutôt comme « Les Feux de l’Amour ». Rassure toi, cela n’a pas empêché toutes mes voisines de pleurer à chaudes larmes tellement l’histoire était tragique… moi j’ai retenu mes fou rires comme j’ai pu.

Il n’empêche que je suis bien content d’avoir pu assister à une représentation de cette célébrissime forme de spectacle, à laquelle je ne serais jamais allé si on ne nous avait pas offert les places. Si d’aventure tu es aussi intéressé, tu peux venir à Takarazuka (voire la page « A la carte » de mon blog), la ville semble d’ailleurs très jolie, pour le peu que j’en ai parcouru, ou à Tôkyô, car oui, la revue est si appréciée qu’elle possède un théâtre dédié dans la capitale, et plutôt impressionnant lui aussi, je te laisse en juger :

A bientôt!

12 comments on “Au théâtre ce soir…

  1. La salle de théâtre est impressionnante !!
    Mais bon je ne suis pas particulièrement fan des pièces de théâtre et encore moins des comédies musicales :p

    • Oui franchement la salle m’a coupé la chique… Je ne m’attendais pas à si grand, et l’impression sur la photo est bien moindre crois moi!

      Clairement, je l’ai dit, je déteste les comédies musicales… j’aime le théâtre par contre, mais là, c’est vraiment pas fait pour moi. Cela dit, le simple fait de pouvoir voir des femmes jouer des hommes (alors que c’est presque toujours l’inverse ici, je le rappelle), est assez intéressant… pour une fois en tout cas 🙂

  2. Merci d’avoir fait le cobaye pour nous.
    Cette troupe m’intrigue depuis le jour où j’ai vu cette affiche de Roméo et Juliette et où il m’a fallu plusieurs secondes avant de savoir laquelle des deux était Juliette (un instant j’ai cru à une troupe féministe lesbienne militante, mais je me suis dit que non, pas au Japon ce genre de trucs). Mais j’avoue que je ne suis pas sûr d’avoir le « courage » d’aller voir de moi même de quoi il en retourne.
    Merci encore. 😉

    • Merci de prendre en compte la dose de courage (ou est-ce de l’inconscience?) nécessaire pour aller se « frotter » à ce genre théâtral… Hum…plus sérieusement, tu n’avais pas eu totalement tort concernant l’homosexualité… En fait, quelques « rumeurs », voire scandales ont gravité autour de ce thème et de cette troupe… Je te renvoie au petit paragraphe qui en traite sur la page Wiki anglaise

  3. …Reste plus qu’a aller voir ça de nos propre yeux pour en juger…moi, non plus je ne suis pas fan des comédie musicales et à ce que j’en ai vu sur youtube, c’est dans la même veine. Ca à l’air moderne en tout cas et il n’y a que des femmes: génial. Est-ce que c’est une chose que tu conseilles ou est-ce qu’on peut s’en passer ?

    • Alors clairement je ne le conseille pas à un touriste de passage, sauf s’il est particulièrement fan de comédies musicales, là c’est sûr, la version nippone est à voir. Mais quelqu’un qui reste pour une bonne période (disons un mois ou deux par exemple) et qui est curieux peut bien aller voir ça, qui reste un divertissement très prisé, et particulier, même comparé aux divertissements de masse mondiaux. Et encore une fois, outre l’écart avec mes goûts perso, techniquement, c’est loin d’être nul! (bon les musiques c’est pas du Wagner, mais bon…)

      Une bonne dose de curiosité, et un peu de budget car les places sont chères (je sais plus combien malheureusement, encore une fois, on nous les avait offerte). Mais à choisir une soirée théâtre au Japon, privilégiez le Kabuki, le Nô ou le Bunraku, même si, là aussi, ce sont des sorties à prévoir dans un budget!

  4. D’une manière générale, l’accès à la culture au Japon est toujours réservé à l’élite. mais ça c’est une autre histoire. A l’instar de ce qu’on trouve à Paris, y’a t-il de petites compagnies et de petites salles qui nous permettraient de voir ce genre de spectacle sans pour autant se ruiner ?

    J’aime beaucoup les spectacles de Bunraku. C’est impressionnant la synchronisation qu’ont les marionnettistes. mais ce qui est dommage, c’est de les voir…l’illusion disparaît un peu.
    Le Nô est particulier, je trouve ça trop long et trop cérémonieux. Je n’ai vu que de petits extraits sur youtube mais je me demande si je ne m’endormirais pas devant un spectacle entier.
    Il y’a quelques années, j’ai assisté à une representation de Kabuki à Paris et à l’epoque ca m’avait paru aussi lent et peu dynamique que le Nô et il faut une petite culture traditionnelle des légendes japonaises pour s’y retrouver. A voir maintenant que je suis plus âgé.
    Je ne sais pas s’il faut que j’accroisse et élargisse mes références culturelles nippones mais dans l’ensemble, je ne suis pas emballé par ces spectacles. A voir en vrai, si je me trompe.

  5. gerald

    J’esperes que vous allez bien.

  6. J’imagine qu’à Osaka il y a moins d’inquiétude quand aux problèmes de nuage radioactif mais bon… l’ambiance générale ne doit pas être joyeuse.
    J’espère que ça va.

  7. Salut, je vois que tu n’as pas de nouvelles sur ton blog…il m’a fallu jusqu’a aujourd’hui pour en poster… comment vas-tu toi et ta copine a Osaka?Comment vivez-vous cette crise?As-tu vu les conseils de l’ambassade de France?

  8. Ça fait rêver!! Moi je suis pas fan du tout du théâtre Japonais ce qui simplifie tout!! J’adorais le cinéma japonais, mais depuis quelques années, c’est pas la fête… Le dernier qui m’ait plu, c’est AN (Les délices de Tokyo), mais en fait c’est une copro Arte… ceci explique cela. Mais là, 3 heures de « niaiseries », c’est en fait un exploit… bravo.

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