Au Japon

Visages de fêtes.

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Bonjour bonjour! A la fin de mon dernier article, je t’ai promis un bonbon si tu étais sage. Oui mais voilà, depuis, il s’est passé quelque chose que je ne peux pas ignorer sur mes pages… Le Gion Matsuri. Un des Trois Grands Festivals du Japon. Il s’étale sur l’été avec différents temps forts lors des premiers jours, et des derniers. C’est évidemment le genre d’endroit où il ne vaut mieux pas aller quand on est agoraphobe, mais nous avons décidé d’y passer une soirée, pour éviter les trop grosses chaleurs. Nous voilà donc partis pour observer les Yamahoko, des chars particuliers et très hauts. Il y en a 33 dans la ville, et ce soir ils sont immobiles. Demain ils seront déplacés, ce qui constitue le point d’orgue de l’ouverture du festival, mais nous, on passe juste les voir de nuit, et profiter du quartier, exceptionnellement devenu piéton! Les bonbons attendront, nous allons à la rencontre de la fête japonaise, et plus précisément de ses visages et de ses regards. En route!

A partir de 18h, les rues deviennent piétonnes. Il est 17h55 et pour l’instant, la foule en transit se contente donc encore des trottoirs, ou presque. Nous remontons en direction du quartier de Gion, nous approchant du Yasaka-Jinja, ne sachant pas encore exactement ce que nous allons voir.

A ce moment là, je suis au bord de la crise de nerf. Beaucoup trop de beaux kimono a prendre en photo, j’abandonne vite la folle idée. la foule est impressionnante, et je pourrais rester immobile toute la soirée à prendre des photos des passants. Mais Sakura a décidé de s’amuser aussi alors bon… je suis sagement madame.

Comme toujours quand il s’agit de faire la circulation des foules, les policiers sont sur le pied de guerre. A chaque carrefour, c’est une brigade entière qui est en faction. Inutile de préciser qu’ils ne cherchent pas les vandales ou les casseurs… non, de toute façon il n’y en a pas… Ils sont tout entier dédiés à la circulation.

Et puis ça y est, petit à petit, les dernières voitures ont fini par passer, et la foule s’octroie un des rues principales de Kyôto. Pour qui a l’habitude de passer ici, c’est assez impressionnant. Rapidement se mêlent à la foule de civils, des délégations de musiciens traditionnels, des moines, et tout un tas de représentants du Japon d’antan, celui que l’on célèbre ici. On les remarque à peine. Un son de flûte, et le temps de les trouver dans la foule, ils ont disparu. Se mêlant à l’ambiance et disparaissant dans les derniers rayons du soleil de la journée.

Je ne résiste tout de même pas à la tentation de quelques fleurs dans les cheveux…

Jolies tenues, voire quelques courtes jupettes…

Ah non pardon! Ça c’est pas une demoiselle, c’est monsieur :

Mêlés à la foule que j’te dis! Et la foule, quand on tend un peu le cou, on voit qu’elle n’est pas qu’autour de nous…

A ce stade de notre remontée vers le jinja, nous croisons une scène en construction. Sakura s’arrête et me demande si je veux attendre. Le spectacle commence d’ici 30 ou 45 minutes, alors je ne suis pas très chaud pour poireauter ici. Mais ma femme sait me convaincre, et nous voilà à faire le pied de grue pour un show dont on ne sait rien, si ce n’est qu’il y aura des Taiko, ces groupes de tambours dont je raffole.

Ici débute une longue attente, durant laquelle j’observe les passants, des plus classiques… au plus… traditionnels.

Quelques mouvements de foule me mettent sur la piste d’une délégation de passage a proximité, mais là encore, difficile de les capter lors de leur passage presque instantané près de nous. Parfois, on repère au loin quelque chose d’étrange…

Mais bien difficile est la chasse à l’image, et le gibier se voit souvent servir flou.

Et alors que mes jambes s’engourdissent, le soleil descend.

C‘est alors qu’une speakerine arrive et annonce que le spectacle va bientôt commencer. Je ne te donne pas le programme, car à ce moment là, je n’ai rien compris à ce qu’elle disait. J’ai donc découvert le tout au fur et à mesure.

La population autour de nous est maintenant impressionnante et je suis bien content d’avoir une place a moins de 10 mètres de la petite scène. A ma gauche :

A ma droite :

Pourtant, le silence se fait à mesure que les lumières des lampions s’allument. Le spectacle va commencer, et je te propose d’y assister, un peu comme moi. Je vais donc me taire, te proposer un air qui accompagnera les images, et ainsi, je l’espère, t’aider à ressentir un peu mon émerveillement.

Rien ne t’empêche de regarder les vidéos, mais je les mets juste pour t’offrir le fond musical qui va avec mes photos. Alors musique…

Lumière…

Et rencontre avec ces visages sans autre expression que leur regard, d’une précision chirurgicale, et fascinante…

Je dois avouer que je ne me suis toujours pas remis de cette vision de grâce. C’est sans conteste cette précision du geste et de l’œil qui m’a le plus impressionné. A la fois froides et excessivement sensuelles, ces Maiko (apprenties Geiko qu’on appelle trop souvent Geisha) ont définitivement quelque chose d’irréel, d’onirique, de divin. A ce moment précis je comprends enfin pourquoi il est si difficile de les voir en représentation, et pourquoi elles sont réservées à l’élite de la société. Indubitablement une des choses qui m’auront le plus marqué dans mes « premières fois » japonaises, qui sont de plus en plus rares. Les Maiko quittent la scène et déjà la suite du programme se dévoile. C’est maintenant au tour d’une école de danse de présenter ses plus jeunes talents. Une troupe de petites filles s’avance, et exécute une farandole elle aussi basée sur la précision de la gestuelle, et les petites vont faire honneur à leurs danses traditionnelles…

Les petites ont été exemplaires elles aussi dans leur application et leur précision. Alors qu’elles quittent la scène, s’installe un groupe théâtral qui va nous exécuter une représentation comique et muette. J’ai le plus grand mal à trouver le nom exact de ce genre de théâtre, et Sakura ne m’est d’aucune aide, mais il semblerait que cela soit du Gigaku, ou du moins une forme très proche. Un petit groupe de musiciens est là, et sur scène se joue une scène comique mimée. Un homme qui rencontre un dragon, puis un guignol local qui vient se moquer du publique et lui jeter ses crottes de nez au visage (ceci est mimé hein, je te rassure). Là aussi, ce sont les visages qui m’ont intéressé, la concentration des musiciens, avec pourtant une légère expression de satisfaction, laissant apparaître leur plaisir de partager leur passion.

Je ne parviens pas à trouver de vidéo comportant une musique proche de celle jouée à ce moment là, alors à toi de faire un effort d’imagination…

C‘est ensuite au tour de deux dragons de venir se battre en duel sous nos yeux ébahis. Chaque animal est manipulé par deux personnes, et la gestuelle est très impressionnante. En moins de 10 secondes, les quatre paires de jambes ont su devenir quatre paires de pattes, et les dragons ont réellement pris vie sous nos yeux. Alternant les mouvements rapides et irréels, et les moments de pause, allant même jusqu’à s’allonger au sol, les bêtes sont vraiment fascinantes, et le mécanisme qui permet aux oreilles et à la gueule de bouger accentue encore le réalisme. Saisissant!

Lorsque les danseuses, car c’en sont, sortent du ventre du dragon, on revient à la réalité et le rêve s’évapore subitement. Charmé par la représentation, j’ai tout de même les jambes bien engourdies et je suis prêt à amorcer le retour à la maison… mais c’était sans compter sur l’annonce qui va nous être faite. Après quelques minutes de pause, le clou du spectacle va être lancé, avec une compagnie de Taiko. C’est de loin ce que je préfère dans les fêtes traditionnelles. Je suis sûr que tu en as au moins déjà entendu parler. Il s’agit de ces formations de tambours (les-dits « Taiko »). Toujours extrêmement sportif, hypnotisant, souvent assez longues, les représentations me ravissent à chaque fois. Je vais donc être encore obnubilé par les visages de la troupe. Le regard fixe, la concentration à son maximum, avec des pointes de sourire aux lèvres lors des montées en puissance, la jouissance des musiciens est palpable. Le groupe est composé de membres de différents âges, et il semble qu’une hiérarchie soit très respectée. Les jeux de nuances de puissance, de rythme, de coordination, et les chorégraphies sont, une fois de plus, hallucinantes. Alors j’ai trouvé une vidéo de ce groupe spécialement, filmée sans doute lors de la représentation de la veille si j’en juge par la coiffure de l’une des protagoniste, il a fait un résumé de 7 minutes, qui, je trouve ne rend pas suffisamment hommage à l’ensemble du show, mais qui essaye au moins de montrer différentes phases, l’image est bonne et le son correct, simplement les vibrations dans nos ventres manquent cruellement. Mais voici donc le meilleur accompagnement possible en vidéo de mes images…

Comme pour les autres, ils commencent par recevoir une bénédiction, puis débutent leur office. Alors observons les de près…

Voilà, cette fois c’est terminé, on en a pris plein les mirettes et les oreilles. Il est tard et la route de la maison est longue alors nous laissons derrière nous l’honneur fait aux traditions, et rejoignons comme des milliers de Japonais, les gares pour regagner nos pénates modernes. Mais, au fait, on était venus voir les yamahoko nous non? Allez, on pousse nos jambes jusqu’au char le plus proche, parce que, quand même c’est ça que tout le monde vient voir à l’ouverture du Gion Matsuri…

Mais nous, va savoir pourquoi, nous nous sommes arrêtés en chemin, et avons plongé nos yeux dans ceux de la tradition. Tu veux que je te dise? Je ne regrette pas! J’en tire une de mes séries préféré de photo depuis le début de ma « carrière » nipponne.

A bientôt!

26 comments on “Visages de fêtes.

  1. gerald

    Magnifique série.

    • Merci beaucoup! Et à bouts de bras, avec le zoom a fond, en focus manuel, et au milieu de la foule, honnêtement, j’en suis assez fier :mrgreen:

      • Vraiment très chouette cet article (et les photos avec). J’imagine que tu dois avoir des bras en béton pour porter un reflex avec un 250 mm à bout de bras toutes la soirée 🙂

        • Merci! Non mes bras sont loin d’être en béton, fort heureusement le spectacle a duré 2 heures, et je n’ai eu à tendre les bras que quelques inutes tout cumulé ^^. A vrai dire, surtout pour les maiko, car c’était le moment où il y avait le plus de monde. Plus tard, c’était un peu moins difficile 😉

  2. jockair

    L’idée de rajouter la musique pour accompagner les photos est excellente , je me suis imaginer dans les rues de Kyoto .
    Merci encore pour cette balade

    • Merci bien, j’espère que ça fonctionne un peu… pas évident de retranscrire l’ambiance, mais avec un petit effort, je pense que vous pouvez vous y sentir un peu 🙂

  3. Rha ça me rappelle des souvenirs… ça me manque 😦 En plus, c’est amusant, je suis en train de lire le roman « Geisha » en ce moment ^^

  4. Ah merci pour ce superbe reportage si bien illustré!
    Tu as beaucoup de chance !!!
    Je ne pense qu’au jour où je retournerai au Japon!!

    • Merci Lili! Oui je sais que j’ai de la chance, et j’en profite au mieux. C’est pour ça que je partage, content que ça contribue à ton impatience de revenir jusqu’ici!

      A bientôt alors!

  5. Superbe série! Certains portraits sont saisissants de précision, de beauté… J’adore ^^

    • Merci! Je crois que c’est la première fois que je me dis que vraiment, je suis content d’avoir un 250mm, et un écran amovible et de bonne qualité, sans ça, inutile d’essayer (j’vous dis pas comme Sakura a été jalouse, et a arrêté de prendre des photos au bout de 5 minutes :mrgreen:)

  6. Hooo j’étais loin de deviner ce que c’était même avec tes 2 photos 😉
    Par contre, la danse du dragon (le 1er sur les photos), j’ai pu avoir la chance de voir une représentation et ce, à la Japan Expo (que tu peux voir en article sur mon blog). C’est exactement ça 🙂
    Ensuite le Taiko, idem j’ai pu bénéficier aussi à la Japan Expo d’une représentation (y avait un français et une japonaise) super impressionnant !! Et très physique aussi 😮

    Les Maiko sont superbes !! Ca valait le coup de patienter 😉
    Y a pas, je préfère 1000 fois ce genre d’articles sur les traditions, merci à toi 🙂

    • « Y a pas, je préfère 1000 fois ce genre d’articles sur les traditions »

      Ah bah bravo! A partir de maintenant, quand je ferai pas un article sur les traditions, je vais m’angoisser de plus plaire à ma plus grande lectrice! 😥
      Plus sérieusement, le dragon m’a vraiment fasciné, et j’ai été impressionné par la performance! Quant aux taiko, c’est vraiment un spectacle dont je ne me lasse pas.
      Merci en tout cas!

  7. Un aller simple pour Gion, sans bouger de la maison (tiens, une rime).
    Merci pour cette très belle série, ça fait briller les yeux !
    J’aimerais vous contacter pour apparaître dans le journal Idées Japon, pourriez-vous me répondre par mail ?

  8. Tes portraits sont vraiment superbes et j’ai été impressionnée par les tambours.Vou savez du vous régaler!
    Bravo

    • Merci, je suis particulièrement content des maiko, mais aussi des percussionnistes et de leurs perles de sueurs! Encore une fois, dans des conditions telles, c’est presque miraculeux!

  9. Magnifique série de portraits ! Et en mise au point manuelle ? La classe totale !!

    Je dois passer par le festival de Taiko de Sadogashima normalement et tes photos me donnent sérieusement envie de me prendre un bon gros zoom !

    • Merci beaucoup! Je me suis vraiment régalé avec le zoom pendant les taiko, à essayer des cadrages pour dynamiser les images. Comme d’habitude d’ailleurs, je n’ai pas recadré mes photos après coup. Vous les avez là comme je les ai prises (par contre je redimensionne désormais les images en 3500×2333 pour gagner un peu de poids, tout en conservant une haute def.) Je t’encourage pour le zoom parce que c’est seulement une fois devant la scène que j’ai vu à quel point je pouvais en tirer avantage, et j’aurais bien regretté de ne pas l’avoir avec moi.

      Pour le mode manuel de toute façon il n’y avait pas le choix, bien trop zoomé pour un automatique facile (et les fleurs de cerisiers m’ont servi de leçon). Mais vu la posture, je m’en sors bien, avec finalement presque pas de déchet en plus.

  10. Bonjour Ondori!
    Ce post, je l’ai lu pendant mes vacances en été et nous voilà en automne à présent!
    Il s’en dégage puissance et beauté de ces regards, expressions et couleurs!
    Merci beaucoup de l’avoir partagé avec nous.
    J’attends les jolies couleurs des feuilles d’automne vues par ton regard!
    Alors, à très bientôt et porte-toi bien ✿

  11. ♫♪♬

    Il est né le divin enfant,
    Jouez hautbois, résonnez musettes !
    Il est né le divin enfant,
    Chantons tous son avènement ! ♫♪♬

    Ondori,

    bientôt Noël et cette page reste figée en plein mois de juillet,
    l’été passé!

    Hé, le Coq, écoute la musique …
    Nous sommes presque à Noël!
    Les musiciens, sont fatigués de jouer sans arrêt!

    Prends la relève, s’il te plaît

    Les fêtes approchent et moi et le Papillon
    te souhaitons un très joyeux Noël dans le Kansas ♥ ✰ ♥

  12. Ah le Gion Matsuri, je ne l’ai pas encore expérimenté mais il me tarde de le vivre en vrai. J’adore les Matsuri japonais.

    • Il est vraiment impressionnant en terme de population aussi! Quand on a l’habitude de Shijô-dori, la voir comme ça noire de monde est vraiment sympa 🙂

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